Lyon : Gourju, premier professeur de philosophie

Pierre Louis Gourju [1762-1814] est le premier professeur de philosophie nommé au lycée impérial de Lyon [Rhône]. Il y enseigne sur toute la période qui va de fin 1809 au  21 avril 1814, date de son décès en fonction. 

De fin 1809 à avril 1814, est en même temps titulaire de la chaire de Philosophie à la Faculté des Lettres de Lyon. Et Doyen de la Faculté.
Né le 13 février 1762, à Morestel [Dauphiné, aujourd'hui département de l'Isère] ; mort le 21 avril 1814, à Lyon [Rhône]. 
C'est le père de Clément Gourju [1814-1899], ancien élève de l'École normale [1827], professeur de philosophie.
1808-1810. L'ENSEIGNEMENT DE LA PHILOSOPHIE DANS LES LYCÉES.
L'article 5, du titre 1er, du décret impérial du 17 mars 1808, portant organisation de l'Université, définit l'ordre des écoles et leurs fonctions spécifiques, au nombre de six : Facultés ; Lycées ; Collèges, écoles secondaires communales ; Institutions, écoles tenues par des instituteurs particuliers ; Pensions, appartenant à des maîtres particuliers ; Petites écoles, écoles primaires.
Aux Lycées revient l'enseignement de la Logique, indiqué dans la liste des matières enseignées : Langues anciennes, Histoire, Rhétorique [anciennement Belles-Lettres], Logique, et les éléments des Sciences mathématiques et physiques. 
Cet enseignement de la Logique est à comprendre encore dans l'esprit de la Grammaire générale, entendue au sens des Idéologues, comme analyse du jugement. 
Une inflexion du contenu de l'enseignement, dans un sens plus conforme à la tradition des collèges royaux d'avant la Révolution française, apparaît dans le règlement du 19 septembre 1809, qui organise l'enseignement. 
L'article 5 indique : « Il y aura une année de philosophie dans les lycées chefs-lieux d'académies ». Soit trente-cinq lycées situés dans les frontières, et hors frontières, de la Révolution.
L'article 17 du règlement du 19 septembre 1809 détermine avec précision la matière de cet enseignement.
Ainsi, c'est à partir de cette date que se met en place, dans les lycées de l'Empire, un enseignement de philosophie comprenant : les principes de la Logique, de la Métaphysique, de la Morale ; ainsi que l'Histoire des opinions des philosophes. 
Le cours est prononcé soit en latin soit en français. Il est confié à un professeur spécifique, à raison de quatre leçons par semaine, de deux heures chacune. Il est indiqué également : Le professeur fera composer ses élèves sur des matières philosophiques.
Pour le traitement et le rang, le professeur de philosophie est un professeur de premier ordre, comme celui de mathématiques transcendantes et de rhétorique.
« Les professeurs de premier ordre des lycées des chefs-lieux d'académie sont professeurs de faculté, et en prendront rang hors du lycée ; mais ils n'en seront pas moins subordonnés au proviseur dans l'intérieur de la maison ».
Enfin, un arrêté du 10 février 1810 décide une extension : « Il sera établi des chaires de philosophie dans tous les lycées qui ne sont pas placés dans les chefs-lieux d'Académies ».
LA DÉMARCHE DE LAROMIGUIÈRE.
Cette réintroduction de l'enseignement de la philosophie se fait vraisemblablement à la suite d'une démarche de Pierre Laromiguière [1756-1837], auprès de l'abbé Martial Borye Desrenaudes [1755-1825], l'un des dix conseillers titulaires du Conseil de l'Université, créé par le décret impérial du 17 mars 1808. 
Démarche complétée par une lettre à Louis de Fontanes [1757-1821], Grand-Maître de l'Université, nommé par un autre décret du 17 mars 1808. Texte dont rend compte François Mignet, dans sa Notice historique sur Laromiguière [1862]. 
C'est ce qu'indique clairement, Prosper Alfaric, dans son ouvrage : « Laromiguière et son École. Étude biographique » [Paris : Les Belles-Lettres. 1929. pages 63 sq.].
1809-1823. PROFESSEUR DE PHILOSOPHIE AU LYCÉE DE CAHORS.
C'est dans ce cadre que Pierre Louis Gourju, est chronologiquement, à partir de la fin de l'année 1809, le premier professeur de philosophie au lycée de Lyon [département du Rhône, académie de Lyon], classé lycée de première classe.
Il y reste en poste, comme professeur de philosophie, jusqu'au 21 avril 1814, date de son décès en fonction.
En 1809 les lycées de première classe sont ceux de : Bordeaux ; Bruxelles ; Mayence ; Rouen ; Strasbourg ; Turin ; Versailles.
Pierre Louis Gourju est remplacé en 1814 dans la chaire de philosophie [le lycée devient collège en 1814], par François Clerc [1769-1847], professeur de mathématiques spéciales au lycée de Lyon, pour l'année scolaire 1809-1810.
LES PROFESSEURS DE PHILOSOPHIE AU LYCÉE, PUIS COLLÈGE ROYAL, DE LYON.
Les différents professeurs de philosophie au lycée, puis collège royal, de Lyon, sont successivement :
Pierre Louis Gourju [1762-1814], titulaire de la chaire de fin 1809 à 1814 ; François Clerc [1769-1847], de 1814 à 1817 ; l'abbé Bellonet, de 1818 à 1825 ; l'abbé Jean Claude Perret [1793-1850], qui semble avoir suppléé l'abbé Bellonet à partir de 1820, et qui est devenu titulaire de la chaire en 1826 et 1827. 
Et enfin, à partir du 6 décembre 1827, l'abbé Joseph Matthias Noirot [1793-1880], titulaire du poste jusqu'au 9 mars 1852, date à laquelle il est nommé Inspecteur général de l'enseignement primaire [9 mars 1852], puis Inspecteur général de l'enseignement secondaire [30 avril 1853], et enfin recteur de l'académie de Lyon [22 août 1854-septembre 1856] au moment de la reconstitution des < grandes académies >.  
Cette succession des professeurs de philosophie au lycée de Lyon offre une configuration particulière. Dans la plupart des lycées, on constate un changement d'orientation des nominations à partir de 1830, autrement dit au lendemain de la Révolution de Juillet, alors que la composition du Conseil royal de l’Instruction publique est profondément renouvelée. Il est réduit de neuf à cinq membres : sur les neuf membres composant le Conseil en 1829, cinq ne sont pas reconduits en septembre 1830 ; trois nouveaux membres sont nommés tous favorables à l'orléanisme, à savoir Abel François Villemain [1790-1870], Victor Cousin [1792-1867], Louis Jacques Thénard [1777-1857]. 
Les anciens professeurs, très souvent des prêtres, sont remplacés, le plus souvent par des anciens élèves de l'École normale. Mais l'abbé Noirot, qui connaît un très considérable succès auprès de ses élèves, va rester en poste jusqu'en 1852, autrement dit sur une période exceptionnellement longue de près de vingt-cinq ans. Certes Victor Cousin tente de libérer le poste au lycée en proposant en 1838, à l'abbé Noirot la chaire de philosophie à la Faculté des Lettres. Ce qui permettrait de placer au lycée Francisque Bouillier [1813-1899], ancien élève de l'École normale [1834]. Mais l'abbé Noirot écarte cette proposition, préférant dit-il se consacrer entièrement à ses élèves de lycée. 
1809-1814. PROFESSEUR DE PHILOSOPHIE À LA FACULTÉ DES LETTRES DE LYON.
Selon la norme de l'époque, sa position de professeur de philosophie [professeur de première classe] au lycée de Lyon permet à Pierre Louis Gourju d'être, en même temps, professeur de Philosophie à la Faculté des Lettres de Lyon.
Il y restera en poste jusqu'à son décès en fonction, le 21 avril 1814. 
Il ne sera pas remplacé : la Faculté est supprimée un peu plus d'un an après, le 31 octobre 1815. Suppression prise par un arrêté de la Commission de l’Instruction publique, commission présidée par Pierre Paul Royer-Collard [1763-1845], arrêté confirmé par l’ordonnance royale du 18 janvier 1816.
Lyon est l'une des dix-sept Facultés des Lettres supprimées [Amiens ; Bordeaux ; Bourges ;  Cahors ; Clermont ; Douai ; Grenoble ; Limoges ; Lyon ; Montpellier ; Nancy ; Nîmes ; Orléans ; Pau ; Poitiers ; Rennes ; Rouen].
Pierre Louis Gourju est en même temps doyen de la Faculté.
Les autres professeurs à la Faculté de Lyon sont : pour la Littérature grecque, Jean Baptiste Poupar [1768-1827], recteur de l'académie d'avril 1816 à février 1817 ; pour la Littérature latine, Jean Baptiste Idt [1771-1855], ancien professeur adjoint de Langues anciennes à l'École centrale du département du Rhône ; pour la Littérature française : Michel Besson [1749-1833], ancien professeur de Langues anciennes à l'École centrale du département du Rhône ; pour l'Histoire, l'abbé Louis Nompère de Champagny [1757-1827], ancien proviseur du lycée de Lyon [26 août 1805-24 août 1809], premier recteur de l'académie [24 août 1809-16 octobre 1815] en même temps qu'il professeur à la Faculté.
CURRICULUM.
Études au sein de la congrégation des Lazaristes, à Mormans, à une dizaine de kilomètres au nord-ouest de Nangis [aujourd'hui département de seine-et-Marne].
1778. CONGRÉGATION DE L'ORATOIRE.
Membre de la Congrégation de l'Oratoire [1778], congrégation religieuse dont la vocation principale est la formation de prêtres destinés à l'enseignement.
À ce titre, Pierre Louis Gourju, devenu clerc, enseigne aux collèges de Riom, d'Effiat, de Tournon, de Lyon. 
Il exerce jusqu'à la suppression de la Congrégation, en rapport avec le décret du 18 août 1792 de la Convention, prononçant la suppression de toutes les congrégations d'hommes et de femmes, tant laïques qu'ecclésiastiques. 
1792-1795. ÉMIGRÉ.
Refusant vraisemblablement de prêter le serment constitutionnel, Pierre Louis Gourju
émigre en 1792. Il est de retour en France vers 1795.
Il abandonne la vie religieuse et se marie.
L'ÉCOLE PRIVÉE DE PIERRE LOUIS GOURJU.
Pierre Louis Gourju effectue des démarches pour obtenir une chaire à l'École centrale du département de Rhône. Mais, celles-ci n'aboutissent pas.
Il ouvre alors un établissement d'enseignement, sis rue Puits Gaillot, proche de la place des Terreaux [aujourd'hui dans le premier arrondissement]. Il y reçoit un petit nombre d'élèves. « Il sélectionne ses  élèves car il veut un enseignement de haut niveau. Mais l'école végète » [cité par theses.univ lyon2.fr/documents/lyon2/…r/…/saussac].
Il est nommé fin 1809 pour être professeur de philosophie au lycée.
PUBLICATION.
Paraît posthume, en 1816 :
La philosophie du dix-huitième siècle dévoilée par elle-même. Ouvrage adressé aux pères de famille et aux instituteurs chrétiens, et suivi d'observations sur les notes dont Voltaire et Condorcet ont accompagné les Pensées de Pascal. Par M. Gourju, ancien professeur de philosophie, doyen de la faculté des Lettres de l'académie de Lyon.
[À Paris : chez Le Normant, Imprimeur-Libraire, rue de Seine, n° 8 ; Méquignon fils aîné, Libraire, rue Saint-Séverin, n° 11. Deux volumes, in-8, 436+427 pp.,1816].
Préface de l'éditeur V-VIII. Avant-Propos IX-XI. En fin de chaque volume : Table des chapitres.