Poret, Hector (1799-1864), un helléniste discret

Major de l’agrégation des classes supérieures des lettres, l’année même où le concours de l’agrégation est recréée [1821], Hector Poret mène une belle carrière enseignante. Sa proximité avec Victor Cousin [1792-1867] lui vaut d’être son suppléant dans la chaire d’Histoire de la philosophie ancienne à la Faculté des Lettres de Paris.

[Pierre Jacques] Hector Poret [1799-1864]. Né le 26 décembre 1798, à Paris [Seine] ; mort le 21 octobre 1864, à Paris [Seine].

1814-1818
PREMIÈRES ÉTUDES
Élève à Paris du lycée Charlemagne ; et de l’Institution Lepître, rue de Turenne.
En 1814, en première année d’Humanités, Hector Poret obtient le premier prix de Thème latin ; le premier prix de Vers latins.
Sixième accessit de Version grecque.
https://www.google.fr/books/edition/Universit%C3%A9_de_France_Distribution_g%C3%A9n/fA5D0dPJ4qIC?hl=fr&gbpv=1&dq=hector+poret&pg=PA43&printsec=frontcover
En classe de Rhétorique, Hector Poret obtient le troisième accessit de Version grecque.

Baccalauréat en 1817.
Licence ès-lettres en 1818.

1819
DOCTORAT ÈS-LETTRES
Docteur ès-lettres [Paris, 3 août 1819], avec une thèse latine : De animae immortalitate.
Dissertatio philosophica : quam ad publicam disceptationem proponit, ad doctoris gradum promovendus, P.-J.-H. Poret, in facultate litterarum jam licentiatus, Die Augusti quartâ 1819, / P.-J.-H. Poret, ab horâ meridianâ ad secundam vespertinam.
[In-4, 16 p., 1819].
La thèse n’est pas dédiée.

  • https://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k5328460d

Le thème de < l’immortalité de l’âme > a été déjà deux fois un sujet de thèse de doctorat : en 1814, traité par Auguste Baron [1794-1862], ultérieurement professeur au lycée d’Orléans ; et par Henri Patin [1793-1876], futur doyen de la Faculté des Lettres de Paris.

La thèse, en français, a pour titre : Examen littéraire des douze Césars de Suétone. Elle est éditée : Académie de Paris. Faculté des lettres. Examen littéraire des Douze Césars de Suétone proposé à une discussion publique, par P.-J.-H. Poret,… (le 2 août 1819…).
[Paris : de l’imprimerie de Fain, Place de l’Odéon, N°4. In-4, 21 p., 1819].
La thèse n’est pas dédiée.

  • Bibliothèque de l’École normale supérieure, ULM LSH, salle 4 [cote : Thèse 49].
  • https://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k5328069r.r=

Le jury de soutenance est composé de : Pierre Laromiguière [1756-1837] ; Jean François Boissonade [1774-1857] ; Jean Charles Dominique Lacretelle [1766-1855] ; Nicolas Éloi Lemaire [1767-1832] ; Jean Denis Barbié du Bocage [1760-1825], doyen de la Faculté des Lettres.

C’est en 1810 que la première thèse de doctorat a été soutenue, par Pierre Fontanier [1765-1844], professeur au lycée de Besançon. En 1819, cinq thèses de doctorat ès-lettres sont présentées à la Faculté des Lettres de Paris, par : Jules Michelet [1798-1874] ; Augustin Théry [1796-1878] ; Aristide Valette [1794-signalé en 1857] ; Hector Poret [1798-1864] ; Balthazard Vernadé [1795-1888].

1820.
RÉPÉTITEUR DANS L’INSTITUTION D’ADRIEN D’ALBAS.
Au lendemain du rectorat, Hector Poret est répétiteur dans l’institution d’Andrieu d’Albas, au 7 rue de Thorigny [ancienne rue Saint-Gervais], dans le quartier du Marais, près du collège Charlemagne.

1821.
AGRÉGATION DES LETTRES.
Dans la volonté de restaurer le système des diplômes de l’Ancien Régime, l’Université remet en place en 1821 [statut du 6 février 1821], l’agrégation des lettres [autrefois agégation dite de second ordre], l’agrégation de grammaire [autrefois agrégation dite de troisième ordre], l’agrégation de sciences.
Les résultats des épreuves de l’agrégation des lettres sont publiés le 29 septembre 1821.
Pour cette année 1821, les épreuves de l’agrégation des lettres se déroulent uniquement à Paris [vingt lauréats].

Agrégation des lettres [29 septembre 1821]. Première année de l’agrégation des lettres. Hector Poret est reçu major.
Alors que François Antoine Joan Mazure, futur Inspecteur général des études, et associé depuis 1817 à des commissions d’Inspection générale, est président du jury, sont reçus à l’agrégation des lettres en 1821, dans l’ordre de classement : Hector Poret [1799-1864], docteur ès-lettres [Paris, 1819] ; Laurent de Luynes [1794-1884] ; Jules Michelet [1798-1874], docteur ès-lettres [Paris, 1819] ; Amédée Daveluy [1799-1867], élève sortant de l’École normale [1818] ; Gabriel Lefevre ; Marie Nicolas Bouillet [1798-1864], ancien élève de l’École normale [1816] ; Théophile Lodin-Lalaire [1797-1896], ancien élève de l’École normale [1816] ; Germain Joseph Delbecque ; Nicolas Rodolphe Taranne [1795-1857] ; Jean Denis Baptiste Labastide [1797-1863], élève sortant de l’École normale [1818] ; Pierre Eusèbe Corbin [1801-1855], élève sortant de l’École normale [1818] : Jacques Auguste Reynaud [1795-1874] ; François Alexis Rara [1798-1877], élève sortant de l’École normale [1818] ; Théophile Marie Janson ; Émile Lefranc [1798-1854] , ancien élève de l’École normale [1817] ; Vertueux Bousson [1796-1829] ; Jean Ladevi-Roche, [1794-1871] élève sortant de l’École normale [1818] ; Louis Bolly [NNN-1823], ancien élève de l’École normale [1817] ; Bernard Forneron [1797-1886], élève sortant de l’École normale [1818] ; François Joseph Maugé [NNN-1832], élève sortant de l’École normale [1818].
Cinq candidats sont ajournés : Agnant ; Anot ; Peytel ; Pottier ; Ribout.

Au lendemain de l’agrégation des lettres [1821], Hector Poret enseigne le grec à Paris au collège royal Charlemagne, puis au collège royal Henri-IV.
C’est à ce moment qu’Hector Poret collabore avec Victor Cousin à la traduction des Dialogues de Platon.

1821.
COLLABORATION AVEC VICTOR COUSIN.
Dès octobre 1812, Victor Cousin [1792-1867] a été nommé élève répétiteur de grec et de latin, auprès des étudiants de première année de l’École normale, comme auxiliaire d’Abel François Villemain [1790-1870], dont il a été l’élève à l’École quelques mois plus tôt.

Par la suite Victor Cousin est nommé maître de conférences de Littérature en 1814-1815. Puis en 1815, et jusqu’en 1822, chargé de conférences de Philosophie.
En 1814, Victor Cousin est attaché comme < agrégé > au Lycée Impérial [Louis-le-Grand] et en été 1815 enseigne également comme < agrégé > au collège Bourbon [Condorcet].
En décembre 1815, Victor Cousin, tout juste âgé de vingt-trois ans, est désigné par Pierre Paul Royer-Collard [1763-1845] comme son suppléant, dans la chaire d’Histoire de la philosophie à la Faculté des Lettres de Paris.
A partir de janvier 1817, il devient collaborateur régulier du Journal des savants, et rédige des recensions dans les Archives philosophiques.
Soucieux de nouveautés, Victor Cousin profite des vacances d’été, pour un voyage d’études en Allemagne, en 1817 et en 1818. Il y rencontre le plus grand nombre possible d’intellectuels, et plus particulièrement Hegel, Goethe et Schelling.
Enfin, en 1819, il est officiellement chargé de l’édition bilingue [grec-latin] des oeuvres complètes de Proclus, philosophe néoplatonicien du Vème siècle, dont il fait paraître le premier des six tomes, dès 1820.
Tout réussit à ce bouillant jeune universitaire. Mais des évènements vont perturber son ascension : son protecteur Pierre Paul Royer-Collard passant dans l’opposition politique n’est plus autorisé à se faire suppléer à la Faculté ; dès lors V. Cousin perd une partie de ses revenus.
À la suite de l’assassinat du duc de Berry le 13 février 1820, l’École normale, considérée comme étant un < un foyer de pestilence et d’agitation libérale > est fermée par ordonnance, le 6 septembre 1822 ; dès lors V. Cousin perd une autre partie de ses revenus. Il échoue en fin 1821 à se faire élire Collège de France, pour obtenir la chaire de Droit naturel et de droit des gens, occupée jusqu’alors par Emmanuel Pastoret, démissionnaire, et qui sera attribuée à Xavier de Portets [1786-1854], candidat de l’Académie des Inscriptions et Belles-Lettres.
Cousin se lance alors à corps perdu dans l’édition savante des textes philosophiques : édition de Proclus [six volumes bilingue grec-latin, de 1820 à 1827] ; édition des Oeuvres complètes de Platon, traduites du grec en français [treize volumes, de 1822 à 1840] ; édition de Descartes [onze volumes, de 1824 à 1826].
Mais pour ce qui est de la connaissance du grec ancien, on connait les réticences de ses contemporains :
Dès 1820, l’helléniste Friedrich Creuzer [1771-1858], professeur allemand de philologie ancienne et d’histoire à l’Université d’Heidelberg, dans une lettre à Georg Wilhelm Friedrich Hegel [1770-1831] rapporte un aveu de Cousin : « Vous savez qu’il a dit lui-même qu’il ne comprenait pas le grec ».
Plus tard, Jules Simon, qui a été son assistant, déclare : « [V. Cousin] avait de sérieuses lacunes […] Il savait le grec, mais comme un lettré, non comme un savant ». Propos prolongé par Léon Séché [1848-1914]: « Il [Cousin] n’était pas si ferré sur le grec qu’on veut bien le dire. Il connaissait beaucoup mieux le latin ».

Pour se protéger d’erreurs toujours possibles, et faciliter sa tâche Victor Cousin sait s’entourer des meilleurs collaborateurs. Ce que Paul François Dubois [1793-1874] résume à merveille : « [Cousin a] cet art singulier d’utiliser les amitiés ou les savoirs, enrôlés à son service, avec lequel [il] sut toujours doubler les parties faibles de sa connaissance technique du grec, et faire faire des recherches pour lesquelles son imagination n’avait que des accès. C’était rejoindre aussi la ligne de son édition de Proclus, œuvre bien chétive, aux yeux des Hellénistes, et dont la préface latine était de la main d’un ami ».

1829
PROFESSEUR DE PHILOSOPHIE AU COLLÈGE SAINTE-BARBE
Hector Poret est nommé en 1829, professeur de philosophie au collège Sainte-Barbe [rue des Postes. Futur collège Rollin], en remplacement de Marie Nicolas Bouillet [1798-1864], en fonction à Sainte-Barbe de 1821 à 1829, nommé suppléant au collège Saint-Louis.
Hector Poret reste en poste au collège municipal Rollin [ex-Sainte-Barbe] jusqu’en 1859. Il est alors remplacé par Julien Brisbarre [1819-c.1883], professeur de < logique >.

1831
CHAIRE D’HISTOIRE DE LA PHILOSOPHIE ANCIENNE
Hector Poret est nommé suppléant [1831-1838] de Victor Cousin dans la chaire d’Histoire de la philosophie ancienne à la Faculté des Lettres de Paris.
En effet, titulaire du poste, Victor Cousin ne fera plus cours à partir de 1830 : Philibert Damiron [1794-1862], sera son suppléant en 1830-1831, puis Hector Poret [1799-1864], en 1831-1838, en même temps titulaire de la chaire de philosophie au collège Sainte-Barbe ; puis Étienne Vacherot [1809-1897] en 1838-1839 ; et enfin Jules Simon [1814-1896] de 1839 à 1852.

1831
DISCOURS INAUGURAL
À l’occasion de sa montée en chaire, en fin décembre 1831, Hector Poret, selon l’usage, fait paraître son discours inaugural :
Académie de Paris. Faculté des lettres. Cours d’histoire de la philosophie ancienne. École d’Alexandrie. Discours d’ouverture prononcé, le 28 décembre 1831 par M. H. Poret, professeur suppléant.
[Paris : Papinot, libraire. Rue de Sorbonne, N° 14. In-8, 38 p., 1832].
https://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k134245w/f3.item.r=poret

Incipit.
« Messieurs,
Le professeur célèbre qui a jeté tant d’éclat sur cette chaire a cru pouvoir me charger momentanément de son Cours. Je me prévaudrais de son choix auprès de vous, si j’avais conscience de l’avoir mérité : malheureusement il a mieux pensé de moi que moi-même. Constamment pénétré des difficultés de ma tâche, j’en suis surtout effrayé quand il m’arrive de songer à vos souvenirs ; et si vous les preniez pour règle de vos jugements, je n’aurais qu’à garder le silence. Je mettrai votre indulgence à l’épreuve, et j’ose pourtant m’y confier. Honoré de l’amitié de M. Cousin, je ne cesserai, au nom de vos intérêts, de réclamer ses avis et ses secours. Dans ce que je dirai, le bien, s’il y en a, viendra de lui et de ses conseils ; le mal n’appartiendra qu’à moi. Vous verrez trop, Messieurs, sans que je vous le dise, que je ne fais pas ici des leçons, mais des études par-devant le public. Je serais heureux, si mes faibles efforts pouvaient aider quelqu’un d’entre vous à entreprendre sur la philosophie ancienne des travaux plus dignes d’attention ».

1838
COMMISSION DE PHILOSOPHIE
Le 9 janvier 1838, le ministre de l’Instruction publique, Narcisse Achille de Salvandy, créé plusieurs commissions : « chargées d’examiner et de comparer les compositions des élèves des classes de philosophie, de rhétorique et de seconde qui ont remporté des prix dans tous les collèges royaux de France ».
Font partie de la Commission de Philosophie : Jacques Matter [1791-1864], Inspecteur général des études, depuis le 20 octobre 1832, président ; Adolphe Garnier [1801-1864], agrégé de philosophie au collège royal Louis-le-Grand ; Marie Nicolas Bouillet [1798-1864], professeur de philosophie au collège royal Henri-IV ; Hector Poret [1799-1864], professeur de philosophie au collège Rollin ; Félix Ravaisson [1813-1900], agrégé de philosophie.

1845
RAVAISSON CÉLÈBRE PORET
Contrairement à Victor Cousin qui a toujours passé sous silence l’aide que lui a apporté Hector Poret dans la préparation de l’édition des Oeuvres de Platon, traduites du grec en français, Félix Ravaisson [1813-1900] se plaît à célébrer publiquement la contribution de Poret à la révision des épreuves de l’Essai sur Métaphysique d’Aristote.
Dans la notule qui ouvre le Tome II de son Essai sur la Métaphysique d’Aristote [Librairie de Joubert, éditeur, Rue des Grès-Sorbonne, 14. In-8, 584 p., 1846] Ravaisson écrit, en date du 23 décembre 1845 : « Pendant toute la durée de ce long travail, M. Hector Poret, mon ancien maître, n’a cessé de me prêter, pour la révision des épreuves, le concours de son amitié et de son savoir. Je dois beaucoup à ses conseils et à ses soins. Qu’il me soit permis de l’en remercier ici ».

RETRAITE ET DÉCORATION
Hector Poret est admis à la retraite en 1859.

Chevalier de la Légion d’honneur.

PUBLICATIONS
1834
Traduit de l’anglais Sir James Mackintosh, Histoire de la philosophie morale, particulièrement au 17 ème et 18ème siècles. Par Sir James Mackintosh. Traduit de l’anglais par M. H. Poret, professeur suppléant à la Faculté des Lettres et professeur de philosophie au collège Rollin.
[Paris : F. G. Levrault, rue de La Harpe, N°81. Strasbourg : Même maison, rue des Juifs. In-8, XL-488 p., 1834]. Préface du traducteur. Notes et éclaircissemens. Table des matières.
https://books.google.bf/books?id=vHwPAAAAQAAJ&printsec=frontcover&hl=fr#v=onepage&q&f=false

James Mackintosh [1765-1832], médecin et juriste écossais, partisan dans un premier temps de la Révolution française, contre Burke, publie Dissertation on the progress of ethical philosophy, chiefly during the seventeenth and eighteenth centuries
[Edinbourg : Adam and Charles Black ; Londres : Longman].
C’est cet ouvrage que traduit H. Poret.

1837
Manuel de philosophie; par Auguste Henri Matthiae. Traduit de l’allemand sur la troisième édition par M. H. Poret, Professeur suppléant à la Faculté des Lettres et professeur de philosophie au collège Rollin.
[Paris : Joubert, Libraire-Éditeur, 14 rue des Grès, près la Sorbonne ; Ladrange, Libraire-Éditeur, 19, quai des Augustins. In-8, VI-XXXI-294 p., 1837]. Contenu du volume. Préface du traducteur. Préface de l’auteur (1832). Tables chronologiques de l’histoire de la philosophie. Table alphabétique des matières.

Auguste Matthiae [1769-1835], philologue et philosophe, directeur du « gymnase » d’Altenbourg [1802-1833], a rédigé, dans l’esprit de la philosophie kantienne, ce manuel : Lehrbuch für den ersten Unterricht in der philosophie [Leipzig. In-8, 1823 ; troisième édition en 1833]. Autrement dit, en traduction française : Manuel pour les cours d’introduction à la philosophie.
C’est cet ouvrage que traduit Hector Poret.

1861
Oeuvres de W. H. Prescott. Histoire de la conquête du Pérou. Précédée d’un tableau de la Civilsation des Incas. Traduite de l’anglais par H. Poret.
[Paris : Firmin didot frères, fils et Cie. Rue Jacob, 56 ; Bruxelles : A. Lacroix, Van Meenen et Cie Éditeurs. Rue de la Potterie, 33. Trois volumes in-8, 1861-1863].

SOURCE