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Nicolas Bergier, Le Déisme réfuté par lui-même, 1825
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SA PARUTION, SA SIGNIFICATION

Le livre
1. C'est en 1765 (sans doute en fin d'année 1765) que paraît Le déisme réfuté par lui-même, ou Examen, en forme de lettres, des principes d'incrédulité répandus dans les divers ouvrages de M. Rousseau, par M. Bergier, Docteur en théologie, Chanoine de l'Église de Paris, de l'Académie des sciences, belles-lettres et arts de Besançon Paris : Humblot, deux parties en 1 volume, in-8 [22,5 x 13,5], XII-285+259 pp.
Lorsque l'ouvrage sera réédité au XIXème siècle, il sera recomposé, in-12 [16,5 x 10], 336 p. Le titre connaîtra un très léger changement. La mention "en forme de lettres" sera placée à la fin du titre, et non dans le corps du titre après examen. La table des lettres et des matières, très détaillée et sur plusieurs pages, présente dans l'édition de 1771, sera remplacée par une table des lettres placée à la fin du volume, sur une seule page.

Références
2. L'ouvrage a été composé sous forme de douze lettres supposées envoyées à J J. Rousseau, dont la dernière est en date du 25 janvier 1765 [cette mention disparaît dans les rééditions du XIX ème siècle] Il se réfère clairement à l'Émile (surtout à sa troisième partie) et aux Lettres écrites de la montagne [publiées par Rousseau en mai 1764, comme réponse aux Lettres écrites de la campagne (septembre-octobre 1763) de Jean Robert Tronchin (1710-1792) Procureur général de Genève (entre 1760 et 1767)]

Ouvrage de circonstance
3.
L'ouvrage, dans l'esprit d'un texte de circonstance, a été rédigé rapidement, en un peu plus de huit mois, entre mai 1764 et janvier 1765. il paraît (sans doute) dans la fin de l'année 1765. Son succès est immédiat (quatre tirages en 1766) et se prolonge sur six ans.

Contre Rousseau
4.
Mais l'ouvrage n'est pas seulement de circonstance. Il est le premier d'une série de livres rédigés à la hâte - dont l'abbé Bergier se fait une spécialité - pour répliquer aux ouvrages irreligieux les plus en vogue. Et le premier de la série (Le Déisme réfuté) est dirigé nommément contre Rousseau, et participe (volens nolens, qu'on le veuille ou non) au harcélement dont il est l'objet.

Rousseau persécuté
5.
La persécution contre Rousseau a commencé à la suite de la publication du Contrat social. L'ouvrage paraît en avril 1762 (édité à Amsterdam, chez Marc Michel Rey). Malesherbes s'oppose à son entrée en France (12 mai 1762). L'ouvrage est condamné et brûlé à Genève (19 juin 1762) en même temps que l'Émile, comme "tendant à détruire la religion chrétienne et tous les gouvernements". Si Rousseau se présente à Genève, il doit être arrété.
La persécution contre Rousseau s'aggrave avec la publication concomitante de l'Émile (imprimé à Amsterdam, chez Néaulme) mis en vente en mai 1762. Tout se fait de manière accélérée. En France les exemplaires mis en vente sont confisqués par la police (3 juin 1762). L'ouvrage est dénoncé à la Sorbonne (7 juin 1762). Le Parlement condamne le livre (9 juin 1762). L'Émile est brûlé à Paris le 11 juin. Rousseau est décrété le même jour de prise de corps et ne doit sa liberté qu'à une fuite précipitée - dans l'après-midi même - de Montmorency vers Yverdon (en territoire bernois). L'Émile est brûlé à Genève (en même temps que le Contrat social) le 19 juin. Le 10 juillet 1762 Rousseau est chassé d'Yverdon et trouve refuge à Môtiers qui fait partie de la principauté prussienne de Neufchâtel.
La stigmatisation continue. Un mandement de Christophe de Beaumont, archevêque de Paris, condamne l'Émile (rédigé le 20, publié le 28 août 1762).
Les autorités génevoises du Petit-Conseil obtiennent de Jean Robert Tronchin, procureur général de Genève, un texte contre Rousseau. Ce dernier répond avec des Lettres écrites de la montagne. Elles sont brûlées à La Haye, puis à Paris (22 janvier 1765). Enfin, pendant la foire de Môtiers, des pierres sont jetées contre la demeure de Rousseau, qui trouve refuge sur l'Île Saint-Pierre, dans le lac de Bienne.

Un succès de scandale
6.
Si Rousseau est célèbre (il y aura foule pour le rencontrer à Strasbourg lors de son bref séjour en cette ville, en 1765) et protégé par quelques grands personnages (Le Prince de Conti de 1759 à 1770 ; le Maréchal de France Charles Louis François de Luxembourg), il est aussi à partir de 1762, celui par lequel, le scandale arrive. Et le succès du Déisme réfuté ne vient en bonne partie que de là. On se plaît à acheter un livre qui prétend, au nom de la religion révélée, confondre encore plus un homme déjà persécuté, honni, pourchassé, que tous les malheurs qui l'accablent désignent comme sûrement coupable.