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La morale en action, 1822. Deux anecdotes édifiantes

Anecdote Italienne.

CHARLES, duc de Calabre, en Italie, rendait journellement la justice à Naples assisté de ses conseillers qu'il assemblait dans son palais; et dans la crainte que les gardes ne fissent pas entrer les pauvres, il avait fait placer dans le tribunal même une sonnette dont le cordon pendait hors de la première enceinte. Un vieux cheval, abandonné de son maître, vient se gratter contre le mur, et fait sonner. "Qu'on ouvre, dit le prince , et faites entrer qui que ce soit. " Ce n'est que le cheval du seigneur Capèce, dit le garde en rentrant : toute l'assemblée d'éclater... Vous riez, dit le prince ; sachez que l'exacte justice étend ses soins jusque sur les animaux.... Qu'on appelle Capèce.... Qu'est-ce qu'un cheval que vous laissez errer, lui demanda le duc ? - Ah !, mon prince, reprit le cavalier, ça été un fier animal dans son temps. Il a fait vingt campagnes sous moi ; mais enfin il est hors de service , et je ne suis pas d'avis de le nourrir à pure perte. - Le roi, mon père, vous a cependant bien récompensé ! - il est vrai, j'en ai été comblé de bienfaits. - Et vous ne daignez pas nourrir ce généreux animal qui eut tant de part à vos services ! Allez, de ce pas lui donner une place dans vos écuries ; qu'il soit traité à égal de vos autres animaux domestiques, sans quoi je ne vous tiens plus vous-même comme loyal cavalier, et je vous retire mes bonnes graces.

Anecdote Turque.

La justice se rend parmi les Perses très-prompte et sans ministère ni de procureurs, ni d'avocats. Un commissaire étant un jour en fonctions, rencontra un bourgeois qui venait de la boucherie, et s'en retournait chez lui. Il lui demanda ce qu'il portait "C'est, répondit le bourgeois en colère, de la viande que viens d'acheter chez tel boucher." Le commissaire, frappé de la réponse et du ton du bourgeois, voulut savoir le sujet de son mécontentement : il s'informa si la viande était trop chère." Sans doute, repartit le bourgeois, vous avez beau fixer le prix, les bouchers s'en moquent ; ils exigent le triple de la taxe , encore ne donnent-ils pas le poids. Il manque à ce morceau au moins deux ou trois onces. - Mène-moi, dit le commissaire, à l'endroit où tu l'as prise. Le commissaire y étant arrivé, ordonna au boucher de peser le morceau , et il s'y trouva effectivement quatre ou cinq onces de moins. Le commissaire alors adressa ces paroles au bourgeois : "Quelle justice demandes-tu de cet homme ? que veux-tu exiger de lui ? - Je demande, dit le bourgeois, autant d'onces sa chair qu'il m'en a retranchées du morceau qu'il m'a vendu. - Tu les auras, répartit le commissaire , et tu les couperas toi-même ; mais, si tu en coupes plus ou moins, tu seras puni." Le bourgeois, étonné de la sagesse du jugement, disparut comme un éclair.

 
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