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Paul Dupont, Typographie musicale, impression topographique, 1853

Nous avons ajouté les intertitres et quelques notes entre crochets [].

Lorsque le livre des Psaumes fut imprimé à Mayence, après la Bible, on y écrivit la musique à la main dans les espaces laissés en blanc. Plus tard, on imprima la notation en caractères mobiles, et l'on se servit d'une seconde forme qui imprimait, en encre rouge, les initiales et les portées, ainsi que cela se voit dans le Psautier de 1490.

Mais la notation n'ayant pas alors de règles fixes, on n'imprimait quelquefois que les portées sur lesquelles chaque acheteur inscrivait les notes à la main : c'est ce qui eut lieu pour le Psautier de 1502.
Géring, à Paris, imprima aussi un Psautier en 1494, avec le plain-chant noté.
Les traités de musique de Gafori furent imprimés en caractères mobiles dès la fin du XVe siècle à Naples, à Milan, à Brescia; Erhard Oglin, à Augsbourg, imprima de la même manière, en 1507, un ouvrage lyrique intitulé Tritonius.
Pierre Hautin, imprimeur à Paris, vers 1525, grava des poinçons pour l'impression de la musique ; la note et sa portée étaient d'une seule pièce. Il employa lui-même ces caractères et en vendit à ses confrères; Pierre Attaignant, libraire, en fit usage dans un livre de chansons nouvelles, imprimé en 1527 ; Nicolas Duchemin, Robert Granjon, au XVIe siècle; Jacques de Sanlecque, au XVIIe, se distinguèrent dans la gravure de ces sortes de caractères; mais la typographie musicale resta encore longtemps bien imparfaite, comme l'attestent nos anciens livres d'église.
Dans le XVIIIe siècle, Breitkopf, à Leipsick ; Fournier jeune et Gando, à Paris, améliorèrent l'impression de la musique en caractères mobiles, et leurs procédés obtinrent quelque succès,
Petrucci eut le premier l'idée de graver isolément chaque note en y adjoignant la partie des portées sur lesquelles elle repose. Cette innovation fut imitée simultanément à Paris, à Rome et à Florence, et, pendant de longues années, on ne changea rien à ce système de typographie musicale, système, défectueux cependant, en ce que la portée se liait rarement avec la note, ce qui formait une ligne interrompue indécise, irrégulière.
De 1832 à 1834, M. Duverger est parvenu à surmonter ces obstacles en appliquant le polytypage à la musique. D'après son procédé, les lignes, les portées et les croisures, les caractères des notes, les indications accidentelles, tout est produit par la composition typographique avec autant de continuité que dans la gravure la plus délicate,
MM. Tantenstein et Cordel, imprimeurs de musique, suivant une autre voie que celle de M. Duverger, ont perfectionné les anciens procédés d'Olivier et de Breitkopf, par lesquels on compose des notes de musique ayant leur portée adhérente. Ce procédé, plus simple et plus économique que celui de M. Duverger, n'a d'autre inconvénient que de laisser quelquefois apercevoir des solutions de continuité aux endroits où les portées se rejoignent; mais, au clichage, il est facile, en retouchant les moules en plâtre, de faire disparaître ces légères imperfections. MM. Tantenstein et Cordel impriment journellement d'une manière très-satisfaisante, et la variété de leurs caractères leur permet d'imiter le plus complétement possible toutes les combinaisons de la musique.
Une première récompense leur a été accordée à l'exposition de 1839; à l'exposition de 1844, le jury leur a décerné la médaille d'argent.
Toutefois, ces différents systèmes d'impression typographique de la musique ne peuvent être employés avec avantage que pour les ouvrages imprimés à un grand nombre d'exemplaires, tels que les livres d'église ou ceux qui servent à l'étude de la musique dans les écoles publiques. Quant à la musique des salons et aux œuvres qui se vendent à petit nombre, l'ancien procédé, consistant dans la gravure sur planche métallique, est encore, il faut l'avouer, plus économique et plus satisfaisant sous le rapport de la beauté de l'impression, ce qui explique sans doute, la préférence que lui donnent, les éditeurs de musique.

L'impression des cartes et des plans
Nous ajouterons ici quelques mots sur l'impression topographique, c'est-à-dire des cartes et plans. Dès le XVIe siècle, on imprimait des figures de géométrie avec des filets, comme cela se pratique souvent encore; mais dans ces derniers temps on a tenté d'imprimer des cartes géographiques avec des pièces mobiles. Breitkopf, de Leipsick, dont nous avons parlé plus haut, fit, vers 1754, quelques essais de ce genre, mais avec peu de succès. Periaux, imprimeur à Rouen, publia, en 1806, une carte du théâtre de la guerre pendant la campagne d'Austerlitz, et, en 1807, une carte du département de la Seine-Inférieure, exécutées l'une et l'autre en caractères mobiles. M. Duverger, à Paris, inventa aussi un nouveau système d'impression topographique dont les spécimens ont figuré à l'exposition de 1844. Enfin, M. Monpied, prote d'imprimerie, a reproduit en filets typographiques, avec autant de patience que de talent, l'Enlèvement de Pandore, d'après Flaxman ; l'Amour et Psyché, d'après Canova. Ces deux dessins au trait ont été imprimés, et présentés à l'exposition de 1849.
Ces ingénieux procédés ne remplacent pas la gravure ; mais ils attestent, dans leurs auteurs, un amour passionné pour l'art typographique, et l'amour de l'art est la cause la plus puissante de ses progrès.

 


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