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J.-F. Sacombe (1750/60-1822), La Luciniade

CHANT I

AU DOCTEUR SOLIMANI.


DOCTEUR,
Par la plus affreuse tempête
Jeté sur des bords étrangers,
Au péril même de ma tête,
J'ai bravé les plus grands dangers.
Fils du dieu de la Médecine,
SOLIMANI, tends-moi la main
Du temple auguste de Lucine
Daigne m'indiquer le chemin ;
J'y déposerai cet ouvrage
Que me dicta la vérité :
Puisse-t-il, avec ton suffrage,
Passer à la postérité !

SACOMBE.


Ce 1er Septembre.

Argument


Le poète invoque tour-à-tour Apollon, dieu de la médecine, de la poésie et de la musique ; Lucine, qui préside aux heureux enfantemens, la Pudeur, le plus bel ornement du beau sexe l'Envie dont les serpens aiment à s'accoupler avec celui de la médecine ; enfin, la Postérité qui seule a le droit de juger les auteurs et leurs oeuvres. Entrevue de Lucine et du Poète aux bords de la Tamise. Éloge des mèdecins-accoucheurs anglais ennemis de l'opération césarienne, pratiquée pour la première fois sur Jeanne de Seymour, épouse d'Henri VIII. Tableau de la France sous la dictature de Robespierre. Lucine présage le retour de la paix et le bonheur de la France. Description d'un repas donné par Lucine à son élève. La déesse exige de son fils qu'il soit à la fois médecin, accoucheur et poète ; elle lui fait présent d'un écrin qui renferme une plume d'airain et deux flacons d'une liqueur composée d'un peu de bile et de nectar. Éloge de la poésie. Lucine prédit la fondation des trois écoles Fourcroytiennes de Montpellier, de Paris et de Strasbourg. Description des parties de la génération de la femme. Système de la génération. Principes de l'école Sacombienne. Dogme de l'immortalité de l'unie consacré dans cette école. Situation de l'enfant dans la matrice à trois différentes époques de la grossesse. Absurdité du système de la culbute du fétus au Septième mois de la gestation. Description du bassin de la femme et des diamètres des deux détroits. Usages des diamètres moyens ou obliques. Danger des instrumens. Possibilité de l'accouchement naturel et laborieux, par la voie naturelle, quelque vicieusement configuré qu'on suppose le bassin de la femme. Mécanisme de l'accouchement naturel expliqué par le mouvement de rotation spirale du corps de l'enfant à terme sur son axe. L'ignorance absolue de ce mécanisme seule cause de l'invention infernale des mille et un instrumens, la honte de l'art et l'effroi de l'humanité. Le forceps rarement nécessaire. Manière de faire l'application, de ce terrible instrument. Manière de reconnaître les vices du bassin, sans le secours du toucher. Le nez de l'enfant, propre par sa structure à diriger, la tête dans l'excavation du petit bassin. Travail insensible et travail sensible. Cause première des grossesses heureuses et des grossesses plus ou moins orageuses. Le poète bercé par les songes s'endort dans les bras de Morphée.



CHANT PREMIER.


Art sublime et fidèle au voeu de la nature
Avant que l'intérêt, l'envie et l'imposture
Eussent à leur caprice assujetti les lois,
Un enfant d'Apollon venge aujourd'hui tes droits.
Apollon, Dieu des vers, Dieu de la Médecine
M'ordonne de chanter l'art heureux de Lucine
Dont Londres me donna les savantes leçons.
Puisse-t-il de ma lyre éterniser les sons ?
Pour prix de tes faveurs, je vengerai ta mère,
Délius ; de Junon je peindrai la colère,
Quand Neptune, à l'instant où tu reçus le jour,
De Délos, sous ses pas, affermit le séjour.
Garde-toi de penser que ma reconnaissance
Se borne à célébrer l'auteur de ta naissance,
Je chanterai ta gloire aux yeux de l'univers.
Ton pouvoir sur les coeurs, consacré dans mes vers,
Du plus charmant des dieux, du dieu de l'harmonie,
Fera d'un pôle à l'autre adorer le génie.
Sur les monts de la Thrace, Orphée à ses accords
Des monstres des forêts enchaînant les efforts ;
Arion, échappant aux horreurs du naufrage ;
Des matelots charmés, domptant l'aveugle rage ;
Amphion, sur des bords par son luth enchantés,
Animant les rochers, élevant des cités ;
Timothée, aux accords de sa touchante lyre,
Subjuguant Alexandre et calmant son délire ;

 


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