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Théodore Jouffroy
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Mars 1842 : Discours de funérailles

T. Jouffroy meurt  le 1er mars 1842.

Ses funérailles ont lieu quelques jours après [13 mars 1842]. Victor Cousin, au nom de la section de philosophie de l'Académie des sciences morales et politiques, et en présence des élèves de l'École normale, prononce un discours, où  [de manière polémique] il fait de T. Jouffroy "le véritable héritier de Laromiguière". À placer parmi les étrangers, dit V. Cousin, "entre Reid et Dugald Stewart, semblable à l'un par le sens de la gravité, à l'autre par la finesse et par la grâce." :

« Lorsque, il y a plusieurs années, nous conduisions M. Laromiguière à sa dernière demeure, j'étais du moins soutenu par cette pensée que mon vénéré maître avait rempli toute sa carrière, et que ce qu'il y avait eu de meilleur en lui vivrait dans un livre consacré. Mais ici toute consolation manque : devant cette tombe qui engloutit tant d'espérances, je demeure frappé moi-même d'un mortel abattement, et j'ai peine à rassembler quelques paroles pour dire un dernier adieu à celui qui nous est sitôt ravi.

[...] Lorsque, au commencement de notre siècle, trois hommes supérieurs, Maine de Biran, Laromiguière, Royer Collard, renouvelèrent la philosophie, de jeunes esprits pleins d'ardeur et de talents s'empressèrent sur leurs traces : parmi eux se distingua de bonne heure M. Théodore Jouffroy. [...]  »

Hippolyte Passy [1793-1880] ancien ministre et membre de la section de morale de l'Académie des sciences morales et politiques depuis 1838, et A. F. Villemain [1790-1870], alors ministre de l'Instruction publique, prononcent également une allocution.

Mars 1842 : Remplacement à l'Académie des sciences morales et politiques par de Rémusat

T. Jouffroy est remplacé à l'Académie des sciences morales et politiques par Charles François Marie de Rémusat [1767-1875], qui vient d'être ministre de l'Intérieur [mars-octobre 1840]. Rémusat, qui a le soutien le plus complet de V. Cousin, est élu dans la séance du 30 avril 1842

Il a été placé au premier rang par la section de philosophie. Au deuxième rang ex aequo : Félix Ravaisson [1813-1900], qui sera reçu à l'Académie des Inscriptions et belles-lettres [1849] puis bien tardivement [1881] à l'Académie des Sciences morales et politiques [au fauteuil de Louis Peisse !] ; et Louis Peisse [ 1803-1880], qui finira par être élu en 1877 ; au troisième rang Jean Jacques Séverin de Cardaillac [1766-1845] candidat âgé proche de Laromiguière, au quatrième rang Adolphe Franck [1809-1893] qui prend date pour une prochaine élection [janvier 1844]. D'après la demande de plusieurs membres on ajoute le nom de Louis Francisque Lélut [1804-1877], qui sera élu ultérieurement [en janvier 1844, à la même séance que A. Franck]. Sur vingt-quatre votants [il y a trente membres en droit de voter] dix-sept suffrages se portent pour Rémusat. Six vers Lélut. Ainsi de Rémusat est facilement élu dès le premier tour

 Juin 1842 : l'édition des Nouveaux fragments philosophiques

La veuve de T. Jouffroy a confié à Jean Philibert Damiron les différents manuscrits laissés par son mari. En effet elle sait les liens d'amitié de près de trente ans qui les ont unis. Tous deux ont été élèves en même temps à l'École normale [1813-1815], tous deux ont été soutenus par V. Cousin pour être élus àl 'Académie des sciences morales et politiques [Jouffroy a été élu en avril 1833 ; Damiron a été élu en décembre 1836], tous deux ont un parcours universitaire assez semblable.

J. Ph. Damiron édite une partie de ces manuscrits, en juin 1842  sous le titre : Nouveaux mélanges philosophiques, par Théodore Jouffroy, Membre de l'Institut, Professeur de philosophie à la Faculté des Lettres. Précédés d’une notice et publiés par Ph. Damiron (juin 1842). [Paris : Joubert, in-12, XLVIII-454 p., 1842]

T. Jouffroy, avant sa mort, travaillait à cette édition : en témoigne une brève introduction d'une page de sa main

Après la longue Préface de l'éditeur [I-XXXIV] Damiron organise le livre selon les chapitres suivants indiqués dans la Table des matières : 

1. De l'organisation des sciences philosophiques, en trois parties

2. De la légitimité de la distinction de la psychologie et de la physiologie [c'est la reprised'un Mémoire présenté par T. Jouffroy à l'Académie des sciences morales et philosophiques, au nom de la section de philosophie, en septembre 1838, dans lequel il s'oppose frontalement aux thèses soutenues au même moment [et dans les mêmes lieux] par François Victor Joseph Broussais [1772-1838]

3. Rapport [fait au nom de la section de morale de l'Académie des sciences morales et politiques]sur le concours relatif aux écoles normales primaires [13 juin 1840]

4. Discours prononcé à la distribution des prix du collège Charlemagne [août 1840]

5. Ouverture du cours d'histoire de la philosophie ancienne à la Faculté des lettres en 1828. Première leçon [en décembre 1828, alors qu'il est suppléant de Charles Millon dans la chaire d'Histoire de la philosophie ancienne]

6. Faits et pensées sur les signes [texte inachevé, septembre 1841]

7. Leçon du 7 février 1834, sur la sympathie

L'ouvrage est réédité en 1861

[Nouveaux  Mélanges philosophiques par Th. Jouffroy, précédés d'une notice et publiées par Ph. Damiron. Deuxième édition. Paris : Librairie de L. Hachette et Cie, in-12, 341 p., 1861],

Réédité en 1872

Dix ans après la mort de J. Ph. Damiron [1794-1862] [Nouveaux  Mélanges philosophiques par Th. Jouffroy, précédés d'une notice et publiées par Ph. Damiron. Troisième édition. Paris : Librairie  Hachette et Cie, in-12, 343 p., 1872],

Réédité en 1882

 [Quatrième édition. Paris : Librairie  Hachette et Cie, in-12, XXXVI-343 p., 1882],

1842 : une édition qui fait scandale

Pierre Leroux fait paraître en 1842  De la Mutilation d'un écrit posthume de Théodore Jouffroy ; avec une lettre à l'Académie des sciences morales et un appendice pour faire suite à la réfutation de l'Éclectisme. Paris : in-8, 1843. C'est la reprise des articles déjà publiés dans la Revue indépendante du 1er novembre 1842 [pages 257-322] et du 25 décembre 1842 [pages 641-680]. Ils mettent en cause la nature du "'texte "Sur l'organisation des sciences philosophiques", qui vient de paraître dans les Nouveaux mélanges philosophiques. Pierre Leroux accuse V. Cousin d'avoir lui-même procédé à des coupes et des réécritures de certains passages du texte initial de T. Jouffroy.

Cette dénonciation est démentie par J. Ph. Damiron qui revendique pour lui seul la responsabilité de réécriture [et d'atténuation du scepticisme] de certains passages ; tandis que, face à la polémique qui prend de l'ampleur, V. Cousin déclare qu'il était partisan, quant à lui, de surseoir à la publication de ce texte.

Célébration de T. Jouffroy

Le Dictionnaire des sciences philosophiques, dont la publication en six fascicules se répartit de 1844 à 1852, consacre un long article à Jouffroy [Théodore-Simon], pages 822-832 [dans l'édition de 1875], sur deux colonnes, signé par Ad. G. [Adolphe Garnier, 1800-1860]. L'article, rédigé par son ancien élève, qui l'a supplée puis lui a succédé dans la chaire de Philosophie à la Faculté des lettres de Paris, célèbre l'auteur et en fait le pendant de V. Cousin : « M. Cousin , exhortait, enflammait tout ce qui pouvait l'approcher, et faisait composer ou traduire une bibliothèque entière de philosophie, M. Jouffroy arrêtait, calmait, donnait le nom de faiseurs à ceux qui se hâtaient de produire. M. Cousin aurait voulu que tout le monde cultivât la philosophie, ; M. Jouffroy ne demandait qu'un petit nombre d'initiés, et voulait qu'ils fissent de la philosophie à leur heure, le matin , en se promenant sous l'ombrage. »

La célébration officielle est celle de l'Académie des sciences morales et politiques, avec le discours de François Mignet [1796-1884], alors memmbre de l'Académie française et  secrétaire perpétuel de l'Académie des sciences morales et politiques : Notice historique sur la vie et les travaux de M. Jouffroy. L'éloge est prononcé en 1853. Compte Rendu des Séances et Travaux de l'Académie des Sciences Morales et politiques, tome 25, pages 197-229

 

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